Société
Poésie

La poésie est une partie mystérieuse de la littérature pour bien des gens. En effet, s'il est de bon ton de réciter des vers de poètes modernes dans les dîners, il est aussi très difficile de comprendre les textes poétiques. A part les fables apprises en CE2, vous n'avez aucune référence valable et vous êtes incapable de faire la différence entre du Paul Valery et du Eve Angeli.


Heureusement, Gorgonzola est là pour vous sortir de la mélasse. Par l'explication détaillée d'un poème de Stewart Breckson, célèbre poète new yorkais des années 70, très à la mode chez les intellos branchés, vous pourrez vous la péter grave en explicant aux incultes que sont vos amis la signification profonde et cachée de chaque mot.




Miranda by Stewart Breckson

Sors de la véranda, Miranda,
Et vois,
Comme l'étagère est plate sur
[ les pétunias.
Je crois,
Pas.
Danse la forêt sombre,
Où agonise la hulotte chouette,
Le chant d'Hercule,
Au printemps fleurette,
Casse le pédoncule.
Pas moi,
Miranda.





Comme vous pouvez le constater, ce poème est chargé d'émotions violentes et contradictoires. Le vers est brisé, haché ce qui trahit le désarroi psychique du poète tourmenté (à noter une envolée lyrique au vers 8).

La récurrence de la virgule qui se croise avec l'accent grave du mot « où » souligne la fougue et la passion du poète pour Miranda. Les rimes sont tour à tour plates et embrassées ; seul le sixième vers « Danse la forêt sombre » ne rime avec rien. Soit Breckson a voulu mettre en valeur ce vers qui est comme le leitmotiv du poème, soit il n'a pas trouvé de rime en -ombre (et pourtant y'avait nombre, décombres, concombre...).

Le mythe d'Hercule est transfiguré complètement, puisqu'il chante, référence évidente à la tradition lyrique. On nage dans le pathos avec le désarroi amoureux de l'auteur visible au multiples rejets et contre-rejets qui disloquent le vers dans son sens mais aussi dans l'espace (faisant parfois loucher le lecteur).

Le poète, véritable intrumentiste de la langue, joue avec les sons (« véranda » / « Miranda », « Hercule » / « pédoncule »). Les champs lexicaux de la nature (« forêt », « hulotte chouette ») s'oppose puis fusionne avec celui de la maison (« véranda », « étagère ») pour se sublimer en un tout cosmique qui se suffit à lui même : « Miranda », la femme-enfant et en même temps la mère nourricière.

Le vers « Pas moi » indique un refus de vivre dans une société capitaliste individualiste (société américaine des années 70), une négation face à l'obéissance aveugle qui confirme son engagement politique (pacifiste durant la guerre du Vietnam).

Stewart Breckson a arrêté ses études très tôt. Comme la plupart des poètes qui ont réussi, il s'est adonné à la drogue dès son plus jeune âge. Mort à 32 ans d'une overdose, il nous offre dans ces vers une leçon de vie aussi intemporelle qu'éblouissante.



Apprenez ce poème et son explication par cœur et régurgitez tout ça devant vos amis ébahis. Prenez garde de ne pas caser votre speech à tout pris. Vous passerez pour une truffe si vous le récitez sans raison. Ayez un minimum d'à-propos, attendez que la conversation porte sur les vérandas, ou les pétunias, etc...

A présent, c'est à vous de jouer...

 
Site géré par arubase (écrit par Thomas Bigot)