Média
C'est mon choix

Chers internautes, on m'a confié la périlleuse mission d'écrire la critique d'une émission de télévision : "C'est mon choix !". Bien que mon employeur ait insisté pour que je modère mes expressions*, j'ai bien peur de ne pas maîtriser ma verve journalistique...

Pour faire court : "C'est mon choix !" est une émission de pauvre. Et c'est pour ça que ça marche. Une émission de pauvre touche els pauvres, donc le plus grand nombre, donc ça fait péter l'audimat. Savant calcul.

En quoi "C'est mon choix !" est-elle une émssion de pauvre ? Tout d'abord, c'est un programme fait avec un minimum de moyens. Le plateau est minuscule et surtout orange fluo (la couleur du pauvre, pour bien qu'il identifie son émission en zappant**). Le seul accessoire : le miroir tournant (très mélodramatique, mais on s'en lasse vite).

De plus, le public qui assiste aux enregistrements est pauvre, ramassé directement dans banlieues sordides à proximité du studio. C'est une des forces de l'émission : quoi de plus touchant que les réactions de masse d'un troupeau de pauvre qui beugle avec une synchronisation émouvante des "ouououh !" et des "aaaaah" toutes les trois secondes. C'est le même public que celui du Bigdil, sauf qu'on lui donne la parole ; et comme vous pouvez l'imaginer : c'est pas triste. Le pire c'est quand le pauvre intervient pour poser sa question toujours conne et dans 90% des cas avec une faute de français à chaque phrase renforçant ainsi le phénomène d'identification du téléspectateur (c'est fort !).

Le principe du show : des faux débats qui n'intéressent personne et qui titillent la curiosité malsaine du gros blaireau sur son canapé. Du style : "Mamie, arrête de porter des strings, tu me fais honte !" ou encore "J'en ai marre d'être belle, je préfèrerais être un thon"... Dans "C'est mon choix !", on a pas peur de ratisser large (plus large c'est pas possible. On ne recule devant rien pour appâter le français moyen : le sexe bien évidemment, mais aussi les litiges familiaux ou encore des valeurs sûres comme la détresse et le ridicule.

Non seulement les sujets sont pourris à la base, mais les intervenants sont au-dessous de tout. On patauge entre les idées reçues, les bons sentiments, les vérités générales... Le débat ne mène jamais nulle part, d'ailleurs, tout le monde s'en fout, l'important, c'est plus de donner la parole au pauvre, si possible en le ridiculisant au passage sans trop qu'il s'en rende compte.

La star de l'émission, c'est Evelyne Thomas. Elle est LA présentatrice emblématique des pauvres, avec sa coupe de cheveux de pauvre (mais qui est responsable ? qui la conseille ? faîtes quelque chose, par pitié !). Elle se la joue Oprah Winfrey, mais à la française et sans le talent. Elle est sympa comme tout Evelyne, elle se balade avec son micro, elle tape la bise à tout le monde, elle essaie de donner un peu de consistance à cette farce grotesque. Elle rit, elle pleure, des fois elle est enceinte, des fois non, elle est comme ça Evelyne, avec sa sensibilité à fleur de peau. Elle sait provoquer l'invité, l'attirer dans le pathos et guider son public, malléable à souhait. Elle est très attachante, et le pauvre l'adore (moi y compris).

Une des spécialités de "C'est mon choix !", c'est le relookaging (eux disent : on prend un pauvre bien moche avec un look qui fait bien honte, pas maquillé évidemment, pour qu'il luise bien sous les projos. Une équipe de styliste et de coiffeurs professionnels s'occupe de son cas en backstage et revoilà notre pauvre les larmes aux yeux avec un look toujours aussi pourri (mais cette fois-ci il ne peut pas se payer les fringues affreuses dont il est affublé), si possible avec une coiffure et un maquillage ridicule (le pauvre croit que c'est le comble du chic), applaudi par un public boulversant d'hypocrisie. Il en faut peu pour émouvoir un pauvre.

Ma conclusion est la suivante et elle est double. Premier cas : le téléspectateur se place au onzième degré, avec un cynisme et un détachement remarquable, il se délecte de toute cette misère humaine. Deuxième cas : il trouve ça juste très con et zappe.

Ne nous remerciez pas...

* J'en suis à deux blâmes pour "insultes vulgaires et gratuites", sans parler de mes douze procès en cours : vive la liberté d'expression !

** Le pauvre est con, c'est bien connu.

 
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