Média
On a tout essayé

Aujourd'hui je vais décrypter pour vous les mécanismes et les rouages de l'émission "On a tout essayé" (proposée par France 2), en tentant de vous expliquer pourquoi c'est drôle et pourquoi j'apprécie ce programme de divertissement.


Le concept

A chaque émission, une demi-douzaine d'invités qui ont quelquechose à vendre viennent se faire casser les uns après les autres par une armada de chroniqueurs méprisants. L'équipe de Laurent Ruquier, parisianiste à mourir, s'en donne à coeur joie pour lyncher le pauvre invité de préférence un bouseux de province intimidé par les caméras.

L'originalité vient du fait que l'invité sert ici à mettre en valeur les chroniqueurs (qui eux-mêmes servent à mettre en valeur Ruquier) et non l'inverse. Comme les jeux du cirque dans la Rome antique où le gladiateur a peu de chance face aux fauves, le suspense est absent, mais c'est toujours plaisant à voir.


La tranche visée

Sur ce fameux créneau, entre 18h et 19h (ou "access prime time" pour les connaisseurs), la concurrence est rude. TF1 assume pleinement son rôle de chaîne privée qui se doit de ratisser toujours plus large pour être toujours plus rentable en nous proposant d'ouvrir des boîtes avec Arthuir, ou de nettoyer le fumier avec Jordy.

France 2, face au rouleau compresseur de la télé-réalité trash surprend son adversaire. Plutôt que de jouer pleinement son rôle de service public en programmant une émission de débat intelligente (et donc par définition inaccessible pour la ménagère de moins de 50 de QI) ou encore un talk-show haut de gamme qui demande des moyens et du talent, la chaîne se lance elle-aussi dans le pur divertissement à la française (comprenez la vulgarité jusqu'à l'écœurement) et tente de battre le géant TF1 sur son propre terrain.

En effet, Ruquier n'a rien à envier à Dechavanne ou Arthur, il ne recule devant aucun sous-entendu graveleux ni aucun calembour affligeant. Si les personnes âgées et le noyau dur du public de TF1 (les pauvres) ont du mal à saisir ses nombreuses saillies, les cadres de 30 à 50 ans (CSP++), parisiens de préférence, sont morts de rires (il n'y a rien de plus lourd qu'un cadre après le boulot).


Une machine bien rôdée

Ruquier a su s'entourer d'une bande de chroniqueurs d'horizons très variés (rappelez-vous la règle d'or pour faire de l'audimat : râtisser large). Pour résumer, la recette est simple, prenez un ou deux pseudos-intellectuels comme l'insupportable Gérard Miller, qui horripile la ménagère de moins de 50 ans qui ne se lasse pas de répéter à chacune de ses apparitions il m'énerve celui-là il se croit toujours plus malin que les autres.

Pour pimenter la sauce, ajoutez-y une pseudo-féministe, j'ai nommé la comique-malgré-elle Isabelle Alonzo qui a souvent du mal à canaliser son agressivité lors de ses prises de position hasardeuses mais toujours très véhémentes. Et pour finir, agrémentez-le tout de pseudos-comiques comme le très crispant Christophe Alévêque (qui enchaîne les bides à une allure vertigineuse), une ou deux pseudos-cruches comme Sophie Garel ou Valérie Mairessse et enfin d'authentiques buses comme Steevy.

Ruquier, grâce à ses contrepétries toujours très à propos et ses sous-entendus toujours apropriés (le CSA ne peut rien faire), parvient à insuffler un rythme dynamique et hilarant à l'émission. On notera les applaudissements toujours spontanés après chaque chute, y compris les plus navrantes. On n'avait jamais vu ça depuis la boîte à rire de "Premiers baisers". Selon moi, le chauffeur de salle mérite un 7 d'or. D'ailleurs j'avais voté pour lui l'année dernière.

La mise à mort de l'invité est toujours très bien mise en scène, Ruquier désigne le chroniqueur qu'il sent d'attaque selon le type de victime. Si l'émission à l'origine était censée avoir pour fonction de tester des produits de consommation, Ruquier a eu l'idée lumineuse d'élargir le concept à tout et n'importe quoi : ainsi on atteint les cimes du ridicule quand Steevy se met à parler politique, quand Sophie Garel joue les critiques littéraires ou pire quand Isabelle Motrot cause cinéma... ce sont forcément des moments d'anthologie.



Vous l'aurez compris, cette émission est à prendre au second degré En résumé si vous êtes cadre, que vous êtes lessivé le soir en rentrant du bureau et que vous êtes trop fier pour regarder TF1, cette émission est faite pour vous.

 
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