Mona Localzi : Chers internautes, je vous prie d'accueillir comme il se doit sur votre écran d'ordinateur Mr Serge Guénard, qui nous fait l'immense plaisir de m'accorder cette interview. Mr Guénard est magistrat du Palais de Justice de Lyon, excusez du peu. N'hésitez pas à applaudir de chez vous en tapotant sur votre clavier.
Serge Guénard : Mme Localzi, vous me flattez... Je suis très heureux d'être ici.
Mona L. : Comment dois-je vous appeler ? Votre honneur ? Excellence ?
Serge G. : Appelez-moi Dieu, tout simplement.
(Silence gêné)
Serge G. : Je déconne, appelez-moi Serge.
Mona L. : (vexée) Et en plus, il est drôle. Bon, en grande professionnelle, j'enchaîne. Quelles études avez-vous suivi pour parvenir à un tel niveau de responsabilité ? Vous deviez être un élève brillant ?
Serge G. : (Rires) Pensez-vous, j'étais loin d'être une lumière à l'époque. En fait mon père était magistrat aussi. Il m'a poussé dans cette voie dès mon plus jeune âge. Il m'a fait prendre des cours un peu partout, il m'a inscrit dans des écoles hors de prix et du coup, après de nombreux redoublements, j'ai fini par y arriver.
Mona L. : Je crois que c'est un grand message d'espoir pour tous les fils à papas. Quand on pense que si mes parents m'avaient payé une école de journalisme, je serai peut-être une grande journaliste comme Laurence Ferrari... et au lieu de ça, je... (Mona est au bord des larmes).
Serge G. : Ça va aller ?
Mona L. : (se reprend) Bon, alors en deux mots parce qu'on va pas y passer la nuit non plus, dites-nous en quoi consiste votre travail ?
Serge G. : Je dirais que mon rôle en tant que magistrat, est d'envoyer des gens en prison, tout simplement.
Mona L. : Vous voulez dire des assassins, des psychopathes,...
Serge G. : C'est sûr que ce serait l'idéal. La réalité est toute autre. Vous savez, j'en ai envoyé un paquet de monde au trou et dans le tas, il doit bien y'avoir des innocents.
Mona L. : Mais enfin, c'est purement scandaleux ! Comment est-ce possible ? Vous devez avoir des dossiers complets et les accusés ont des avocats pour les défendre. Ce genre d'erreur doit-être assez rare j'imagine.
Serge G. : Mais pas du tout ! Vous savez, on manque cruellement d'argent au tribunal,...
Mona L. : Excusez-moi de vous interrompre. Au fait, vous gagnez combien par mois ?
Serge G. : Quarante KF, pourquoi ?
Mona L. : Je ne me rends pas compte, ça fait combien de K€ ?
Serge G : Environ six 6 000 €.
Mona L. : C'est bien ce que je pensais. Poursuivez.
Serge G. : Je disais que nous manquons cruellement d'argent. On manque d'effectif, alors forcément on prend du retard, ce qui fait qu'on doit bâcler certains dossiers. Je ne vous cacherai pas que le week end je préfère organiser un petit barbecue en famille au calme plutôt que de m'enfermer dans mon bureau jusqu'à point d'heure à bûcher sur des affaires toutes plus ennuyeuses les unes que les autres. J'ai une vie en dehors du boulot.
Mona L. : Je comprends tout-à-fait. Moi c'est pareil. Je ne prépare jamais mes interviews.
Serge G. : Ça ne se voit pas du tout.
Mona L. : Merci.
Serge L. : Le pire c'est pour les pauvres. Bien souvent, ils n'ont pas les moyens de se payer un avocat. Soit on leur file des étudiant de 1ere année qui ne font pas la différence entre le code pénal et le guide du routard, soit on les envoie en taule directement.
Mona L. : Dans le doute... c'est plus prudent.
Serge G. : Vous avez tout compris..
Mona L. : Pour finir, j'ai juste une petite question personnelle.
Serge G. : Allez-y Mona.
Mona L. : Vous pouvez me faire sauter deux ou trois PV ? Parce que depuis une semaine, y'a un conard qui me pique ma place dans le parking sous-terrain et du coup,...
Serge G. : Désolé, je ne m'occupe pas de ce gente de cas. Par contre si vous agressez quelqu'un ou si vous commettez un meutre, je vous innocenterai avec plaisir.
Mona L. : Trop aimable. Et c'est sur cette offre généreuse que se termine cette magnifique interview. Je vous souhaîte une bonne semaine à tous. Au revoir Serge.
Serge G. : Au revoir Mona.
Mona L. : On se croirait au télé-achat.